CyberOmbre : Résumé du projet de recherche universitaire

Notre modèle d’éducation est dominé par l’autonomie et le développement personnel. Suivant ce modèle, les industries médiatiques outrepassent l’autorité parentale et imposent un mode de vie centré sur la liberté individuelle, différente de celle imaginée par les philosophes des Lumières. De l’autre côté, les parents craignent l’affaiblissement de la transmission des valeurs qui garantissent une société démocratique : le respect de l’enfant et de son immaturité, la non-violence, le respect d’autrui, le dialogue et la dignité humaine.

Sans la perspective claire d’une régulation de contenus à risques, des experts interviennent alors dans les écoles pour un meilleur usage des médias. Ainsi, certains lycées et collèges, par le médium théâtre, tentent de permettre aux jeunes de repenser cette emprise numérique. Après plusieurs résidences avec des élèves, l’intervenant entame la présente recherche pour acquérir des clés d’accès à cette microsociété où les jeunes sont souvent en déprise de ce qui leur arrive.

La scène est révélatrice d’un grand manque de présence, de perception des choses immédiatement proches ; conséquence d’une perception biaisée par les prothèses techno-sensorielles et d’une domination du présentisme. Il n’y a plus le temps de penser, plus de temps inutile. Ceci augmente les risques de manipulation et de dérive idéologique dans une société fonctionnalisée. En dehors des normes imposées, cette scène, cet espace vide tente de réunir des conditions de présence pour que le jeune puisse se permettre de réinventer de nouveaux rapports entre les objets. Il traverse l’écran pour créer une image, tu n’es qu’une ombre et l’ombre est toi, et voilà tout. Il jubile avec, il s’emprisonne dedans, puis se libère du monde des apparences. Alors, le vécu esthétique s’intensifie. Parfois, par surgissement, s’ouvre une brèche, un éclair le traverse, son visage se tanne de lui-même, comme Angelus Novus ; le jeune s’approprie son monde. Cette brèche est là pour penser, comme un vent, une recherche de signification dépourvue de toute signification, pour le sens commun comme définit Hannah Arendt. Dans cette première phase de recherche l’auteur étudie les conditions de production de présence et d’un vécu esthétique sur cette scène. Dans une seconde phase, il tente de transformer cette scène en une arène où les valeurs de l’univers numérique affronteront celles des autres, sous l’arbitrage des jeunes.